Pas de bebe à bord – Gisèle Palancz
Pourquoi ce livre ? Je suis très intéressée par certains débats de société dont celui-ci. En le voyant sur l’étagère de la bibliothèque peu après une discussion avec des camarades de classe sur ce sujet, je l’ai emprunté pour essayer d’approfondir ce thème et voir ce que donnaient les témoignages évoqués dans le résumé de l’éditeur. A nouveau, il ne s’agit pas d’un livre aux thématiques de fêtes, mais je fais peu de lectures reliées aux évènements festifs de l’année ^^
Pas de bébé à bord : Choisir de ne pas avoir d’enfant… Pendant des millénaires, avoir des enfants allait de soi. C’était le destin des femmes dès la puberté. Celles qui n’avaient pas d’enfant étaient mises au ban de la société. Au 20e siècle, cette certitude a été remise en cause grâce aux méthodes contraceptives de masse et aux pressions démographiques. Partout en Occident, des femmes ont réalisé avec stupeur que le désir d’enfants n’était pas nécessairement vital. Bien des femmes dans de nombreux pays la voyaient comme une fatalité. L’auteure dresse un portrait, très bien documenté, de l’histoire de la maternité à travers les âges. Dans nos sociétés occidentales modernes toutefois, elle est, en principe, un choix. Pourtant, même si le questionnement est aujourd’hui légitime, il n’est pas toujours bien accueilli. La pression sociale incitant à entrer dans le moule traditionnel de la maternité demeure énorme. Défendre son choix requiert donc une bonne dose de courage. Les préjugés sont tenaces, et beaucoup de femmes finissent pas céder, car elles en ont assez de se justifier. Celles qui maintiennent leur choix tentent la plupart du temps de le passer sous silence pour éviter les réactions parfois assez vives. Les médias n’ont aucune gêne à parler abondamment de sexualité, de couple, d’éducation des enfants, de fertilisation in vitro, etc. Remettre en question l’appel de la maternité semble par contre le dernier des tabous. Cet essai vise donc à susciter une réflexion chez le lecteur, au-delà des idées reçues et des vérités qui semblent immuables. L’auteure cède la parole à plus de 50 femmes qui témoignent de leur choix de ne pas donner la vie.
Ce texte ne se veut pas comme une étude approfondie de psychologie des femmes qui ne souhaitent pas avoir d’enfants, mais plutôt un portrait, simple à lire et fluide, de la considération de la maternité à travers l’Histoire, des associations internationales et nationales regroupant ces mères, et enfin, surtout, le témoignage de celles-ci. On ne peut nier que c’est le plus important, puisque par le couvert d’anonymat, elles s’expriment sans crainte d’être jugées, et ce sont ces avis qui permettent à l’auteur de tirer des analyses assez justes de cette absence de maternité chez elles. Et par là, on arrive à ce qui nous intéresse : les raisons d’avoir ou de ne pas avoir d’enfant, pour certaines femmes.
Le sujet est d’actualité même si en fait, on en parle peu. Comme le souligne l’auteur, c’est un tabou, car dans la société actuelle une femme ne peut en être totalement une, à condition d’être mère. Si elle ne l’est pas, on la qualifie d’égoïste, on sort l’excuse « ça viendra » ou autres horloges biologiques, ou on le met sous le compte de traumatismes. Comme si une femme ne pouvait pas choisir de ne pas avoir d’enfant, comme si c’était une étape obligatoire dans son existence. Et c’est ce qui l’a toujours été depuis des millénaires, jusqu’à la remise en question due à la contraception. Remise en question qui finalement ne trouve d’échos croissants qu’aujourd’hui, puisque si on entend parler un peu de ce choix d’être mère ou non, cela reste quand même très peu abordé, voire pas du tout.
Je pars autant de constations émises par l’auteur, que celles que j’ai moi-même faites au fur et à mesure de la lecture. En partant du fait que les médias actuels représentent la société (et ils le font), en observant différents films, différentes séries, voire des livres, on ne peut que constater que les femmes, héroïnes ou non, sont condamnées à devenir mères. Si elles ne le sont pas, elles sont des lycéennes, des étudiantes, des « adolescentes » même à l’âge adulte, avec l’égoïsme que cela contient, des femmes pas encore en couple ou qui le deviennent, une sorte de pré-statut maternel. Ou alors ce sont des personnages négatifs (genre femme fatale) ou bien on retrouve un problème médical qui empêche la conception, ou des businesswomen, ou des aigries. Avouez qu’il n’y a pas grand-choix positifs, comme si un certain âge, on devait passer à ce statut de mère. Chose qu’on retrouve dans la société actuelle, puisque même si ce n’est pas aussi tôt que des décennies auparavant, on attend toujours à ce qu’un certain âge et une certaine situation, une femme soit en couple ; puis que les enfants suivent. Et plus elles vieillissent, plus elles suscitent des interrogations souvent gênées ou sous-entendant l’accusation. Or, on ne demandera jamais à un homme de subir une pression sociale sous le prétexte qu’il n’est pas père ; tout comme on ne blâmera jamais un homme de laisser son enfant à la maison, sous garde de sa femme ou d’une autre personne, pour aller voir des amis, alors que pour une femme, c’est déjà plus mal vu. L’auteur met ici en relief la culpabilité omniprésente que l’on impose aux mères à la suggestion de « vivre leur vie de femme » ou si elles veulent continuer leur carrière en ne restant pas au foyer…alors que le couple est censé être égal, comme d’habitude, les mentalités n’y sont pas encore. Ce sont des « habitudes » traditionnelles qui sont tellement ancrées qu’on ne les remarque même plus.
Mais ceci n’est qu’un exemple des questions soulevées. Le plus intéressant est de voir les raisons de toutes ces femmes qui ont accepté de témoigner sous des alias, de différents âges (de 20 à 50 ans) sur leur choix de vie. Pour certaines, ce sont des nécessités imposées par la vie : pas d’homme dans leur vie, difficulté médicale à se gérer déjà soi-même. Mais pour beaucoup c’est simplement un choix personnel. Une ne se sentira pas maternelle, une autre a décidé cela avec son compagnon qui ne désirait pas d’enfant ; une telle refuse de donner naissance dans un monde et une société qui se dégradent, une autre encore ne se sent pas capable d’être aussi responsable d’un enfant, ce qui égale après tout la vie entière d’un autre. Une grande part semble avoir décidé et compris très jeunes, que la vie de mère n’était pas pour elle. Peu semblent donner des raisons purement égoïstes, ce qui ressort, c’est simplement cette capacité que certaines ont à être mères, et d’autres pas. Après tout, nul n’est obligé d’avoir d’enfant. Mais comme l’essai le souligne aussi, la société, la famille, le compagnon, le désir de normalité, de rentrer dans le moule, de cession de pressures sociales et familiales, les accidents aussi, font parfois que ces femmes deviennent mères sans réellement le vouloir : elles subissent en tout cas une pression réelle. Et on a cependant aussi quelques témoignages, statistiques, qui démontrent que certaines mères, sans regretter le monde du monde leur amour pour leur enfant, admettent que si elles retournaient en arrière et avaient le choix, elles n’en auraient pas. Et cela n’empêche pas ces femmes d’aimer cependant les enfants, même si ce ne sont pas les leurs.
En somme, j’ai plus apprécié la lecture de ce livre que je ne m’y attendais, surtout qu’il ne se veut pas moralisateur, ou proposer de solution : il dresse simplement un état des choses et donne la parole à des femmes qui peuvent, sans crainte d’être jugées, s’exprimer sur leur choix de ne pas enfanter et la façon dont elles vivent en conséquence. Une lecture intéressante, qui éclaircit de nombreux points sur ce thème et qui donne à réfléchir.
Essai français.
Editions : Marcel Broquet
Parution française : février 2001
Disponibilité : épuisé, en bibliothèque (je suis désolée d’être autant une spécialiste des livres épuisés ou difficiles à trouver…^^’)
160 pages.
EAN : 9782923715438
Lecture en cours : Les jardins de Kensington de Rodrigo Fresan.
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C’est un sujet intéressant, pas très politiquement correct… J’ai beau être un homme, je ressens également cette pression de la société…
Oui, et même pas du tout politiquement correct dans certains milieux où la question ne se pose même pas et tout va de soi. J’ignorais en revanche que du côté des hommes on pouvait également ressentir cette pression, de manière aussi acérée du moins…de la part de la famille, ou de la société en général ? Cela doit également dépendre de si on est en couple ou célibataire.
Une pression de la part des couples autour de nous qui demandent « alors c’est pour quand ? », comme si les choses allaient de soit… Je ressens comme un besoin de me/nous justifier. Bien sûr, ce n’est pas non plus une pression perpétuelle, mais n’en est pas moins présente.
Pas de problème pour la coquille 😉
Même si elle n’est pas perpétuelle (et je pense qu’elle en est d’autant plus insidieuse qu’elle est justement rappelée uniquement de temps à autre, au cours des conversations les plus ordinaires) elle reste en effet présente. Et même si personne ne le rappelle, elle est là justement quand on voit les gens dans son entourage se marier et avoir des enfants, qu’on soit seul ou déjà en couple. Les choses ne sont pourtant pas aussi simples et à mon avis on devrait toujours attendre d’avoir une sorte d’appel, après aussi une mûre réflexion. Certes, ce qu’on ne connaît pas peut difficilement nous manquer, cependant, on ne peut pas prévoir si on est fait ou plus ou moins apte à avoir des enfants. Et c’est pour tout cela que je me demande grandement quelle est la part d’inconscient influencé par les autres et la société, qui fonctionne quand on décide d’avoir un enfant, par rapport à une décision pleinement consciente. Les choses ne sont pas toujours naturelles ou innées. Mais comme ça reste une des choses solidement ancrées dans la tradition et les moeurs, parfois on se pose moins de questions qu’on ne devrait sur le sujet.
C’est clair ! Je suis d’ailleurs toujours sidéré par le fait que les gens semblent se poser beaucoup plus de questions sur le choix mariage, que sur celui d’avoir des enfants, alors qu’il s’agit d’une question encore plus importante. Comme tu le dis, il y a vraiment une grosse part d’inconscient dans cette histoire.
Oui, je n’y avais pas pensé ! Peut-être parce que c’est dans cette même lignée, une fois le mariage choisi, les enfants semblent aller de soi..alors que l’un n’entraîne forcément pas l’autre si on regarde objectivement et que le premier est potentiellement moins « important » ou plutôt conséquent. La prédestination à avoir des enfants, c’est bien vague…L’évolution et la maturité des choix de vie n’est pas encore là, s’il faut attendre qu’on remette ça en question comme pour le mariage, qui a mis longtemps à ne pas être « obligatoire » aussi.
« mais elle n’en est pas moins présente » voulais-je dire, désolé pour la coquille.