La chambre d’Hannah – Stéphane Bellat
Parfois, des torrents de surprises nous guettent. Après lecture, j’ai parcouru quelques critiques du titre « Une fille, qui danse » qui n’étaient pas très favorables. Souvent, le livre était considéré comme « trop philosophique » alors que j’avais trouvé cette perspective du regard de l’adulte sur l’adolescent au contraire primordiale. Maintenant, je viens de finir un livre que tout le monde salue et je suis partagée, c’est pourquoi j’adopterais la forme très scolaire du pour et du contre dans ma critique. En attendant, si vous ne connaissez pas, voici le résumé et la couv =)
« Paris, février 1992. Pierre Descarrières, 11 ans, est malheureux, coincé entre une vie terne et des parents qui se déchirent quotidiennement. Seul dans sa chambre, il rêve d’un frère ou d’une soeur qui viendrait rompre sa solitude. Paris, février 1942. Hannah Klezmer, 11 ans, étouffe dans l’espace confiné de son appartement, mise à l’écart parce qu’elle est juive. Leurs routes n’auraient jamais dû se croiser.
Et pourtant, c’est arrivé. Car il existe entre eux un lien plus fort que le temps et la folie des hommes. Si La Chambre d’Hannah plonge ses racines dans l’Histoire la plus sombre, c’est aussi le roman sensible et lumineux d’une amitié entre deux enfants qui n’ont, au premier abord, rien en commun : ni leur condition, ni leur époque. Avec, en filigrane, ces deux questions essentielles : jusqu’où aller par amitié ? Sommes-nous prêts à croire l’impossible ? »
Au départ, l’idée est très simple. Pierre est un jeune adolescent déprimé se sent terriblement seul et la force de son imagination, l’envie d’avoir quelqu’un le poussent à rencontrer Hannah qui se sent également exclue à cette période où la discrimination et l’étoile jaune sont arrivées. Passée la surprise, ils échangent un peu, apprennent à se connaître. Pierre ne connaît rien à la seconde guerre mondiale (pour ma part, j’ai trouvé assez énorme qu’il n’y connaissent rien de rien mais bon, ils sont jeunes, admettons) et avec son meilleur ami Maxime, ils essaient d’en apprendre plus. C’est une solide amitié qui se bâtit entre ces enfants qui sont d’époques différentes. J’ai apprécié le traitement sur le personnage de Maxime qui n’est pas qu’un figurant et qui se développe au long du roman. Il a aussi ses gaffes, ses moments de courage, ses peurs et j’ai apprécié cela. Quant aux parents, ils sont très crédibles jusqu’à la seconde moitié du livre où leurs réactions sont assez simplistes finalement. On ne sait pour ainsi dire rien d’eux et j’ai trouvé cela dommage.
Les allers et retours entre le présent et le passé se font tout naturellement et à la manière d’un Pierre inquiet et impatient, le lecteur a également hâte de savoir ce qui se passe dans la vie de la jeune Hannah. Le récit est ponctué de passages tendres et ma foi assez symboliques qui font réfléchir les lecteurs. Je l’ai lu dans certains commentaires et j’appuie ce point de vue : cet ouvrage aurait, je pense, sa place parmi les lectures des collégiens au même titre que « Le garçon au pyjama rayé » ou Le journal de Anne Frank. Il permet au jeune public de s’interroger sur cette guerre qui ne se présente pas comme une guerre, sur les conditions de vie pour les juives à cette époque. D’autre part, il permet aussi de réfléchir sur les discriminations qui peuvent exister envers un peuple, un groupe… Sans parler d’époque, rappelons qu’aujourd’hui beaucoup d’enfants n’ont pas le droit d’aller à l’école, chose qui paraît toute bête et logique pour un petit occidental de notre époque mais qui est un rêve pour d’autres enfants, ailleurs… Pour tout cela, j’ai aimé lire ce roman.
Toutefois (parce qu’il y a un « mais ») des petites choses ont attiré mon attention. Les raccourcis dans les réactions des parents m’ont parfois interpellée. Au début plutôt développés, ils ont ensuite été « délaissés » au profit des enfants et finalement, ils suivent le mouvement sans réel questionnement. On sent que l’auteur a essayé de justifier leurs choix par rapport à leurs réactions mais je les ai trouvées peu développées et un peu facile. Cela m’a confortée dans l’idée que je conseillerais plutôt ce roman à un public adolescents car je pense qu’ils seront plus attentifs au coeur de l’histoire et moins à cette subtilité sur les personnages secondaires. Aussi, je ne savais parfois pas si je me trouvais dans les yeux du Pierre de 11 ans ou dans ceux d’un Pierre adulte qui raconte son histoire. Certaines remarques laissent entendre qu’il s’agit d’une ancienne histoire mais après avoir lu « Une fille qui danse » qui jouait parfaitement avec le regard rétrospectif, j’ai trouvé qu’ici, ce n’était pas assez tranché. Par exemple, l’auteur dit par exemple « J’étais trop… ceci cela même si je ne connaissais pas ce mot ». Donc le narrateur adulte juge le narrateur enfant. Pour moi, cela aurait dû être un fil rouge tout au long du texte ou ne pas apparaître du tout. Le fait qu’on voit ce genre de remarques une fois ou deux, j’ai trouvé ça un peu maladroit, ou indécis.
Enfin, je vais finir par un énorme point d’interrogation et j’espère que ceux qui ont lu le livre viendront échanger avec moi à ce propos : LA FIN ??? Je n’ai vu aucune remarque sur les blogs de lecteurs et pourtant, elle m’a tellement déçue ! En fait, Pierre essaie d’agir sur le destin d’Hannah. Donc qu’il la sauve ou pas (vous le découvrirez à la lecture…), cela me paraissait logique que ça se termine ainsi. L’arrivée de l’homme de la rue sur la fin était un peu étrange mais pourquoi pas. La scène presque finale était très bien. Et soudain, pourquoi a-t-il fallu que ce policier (sorti d’on ne sait où) intervienne ? On sentait gros comme une maison qu’il allait se passer quelques chose avec l’un des personnages secondaires mais là, j’ai trouvé ça totalement… superficiel par rapport à l’histoire. Pour moi c’est une « sur-fin » qui a peut-être le but de finir sur une belle image familiale mais ma question est : Pourquoi ? Honnêtement, j’ai trouvé ça gros et inutile. Je pense que l’auteur aurait dû avoir confiance dans son final et dans l’imagination du lecteur plutôt que faire un rajout qui, moi, m’a quand même déçue. Ma fin à moi précède les dernières pages.
En somme, je vous conseille la lecture de ce roman mais je dirais qu’il est à prendre comme un roman jeunesse ou fantastique et donc avec une dernière distance et de la clémence vis-à-vis de certaines réactions des personnages. L’histoire est jolie, l’amitié entre les personnages principaux touchante et il donne à réfléchir sur le devoir de mémoire et la situation des enfants pendant la seconde guerre mondiale.
La chambre d’Hannah – Stéphane Bellat
Publié par « Micro application » (si si) sous l’isbn : 9782822402972 à 17.90 euros
Crédit image : http://www.enseigner-histoire-shoah.org/
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