Pourquoi ce livre ? Il s’agit du livre de septembre pour les lectures communes avec la blogueuse de Passage à l’est. Une manière de découvrir ainsi la littérature hongroise…
Un enfant grandit, écartelé, entre sa communauté tzigane de naissance et la société hongroise dans laquelle il est scolarisé. Au fil d’une histoire haletante et dramatique, il apprendra qu’on ne peut accepter sa propre identité dans toute sa complexité que par la confrontation, douloureuse, avec l’autre. Si Couleur de fumée a obtenu en quelques années une consécration internationale, c’est parce que Menyhért Lakatos a su tirer de son expérience personnelle une épopée vibrante qui met magnifiquement en scène les trois actes de la tragédie du peuple tzigane : la nostalgie de la liberté, la violence tribale et l’abomination du génocide.
Couleur de fumée est sans doute le roman que j’aurais le plus apprécié pour l’instant dans ces lectures communes hongroises. Pourtant, c’est loin d’être le plus positif ou le plus souriant. L’histoire, visiblement inspirée des souvenirs de l’auteur, qui a connu le monde tzigane d’avant la seconde guerre mondiale, est en effet loin d’être joyeuse, et pourtant elle se révèle assez fascinante et prenante à lire. Boncza, le narrateur, nous raconte à travers ses yeux et ses pensées, cette communauté tzigane dans laquelle il vit, le monde de ce peuple, son histoire, sa façon de vivre, ses coutumes, ses rites. On passe du moment où il est encore enfant, un pré-adolescent, à son âge adulte, lorsqu’il est marié, futur père, à la veille de la seconde guerre mondiale, à la veille de la déportation dans des camps. Ce roman, s’il n’est pas gai, dévoile cependant une société complexe et peut bien intéresser tous les curieux de la communauté tzigane ou encore ceux particulièrement intéressés par la période d’entre-deux guerres.
Pendant ces presque quatre cents pages, l’auteur, le narrateur, nous donnent à voir une communauté partagée, contrastée et contradictoire, organisée en tribus, qui tire sa fierté de son passé, tout en criant son malheur et sa difficulté à vivre. Ce roman, qui donne à voir les tziganes d’un point de vue quasiment sociologique, a cependant une narration rythmée et fluide, entraînante, et qui pousse à mieux comprendre la communauté tzigane de Hongrie. Difficile de résumer tout ce qu’on y apprend, entre des mots de dialectes, leur vision des Hongrois qu’ils côtoient et considèrent comme des ennemis, des fuites effrénées pour éviter les policiers, les visions désacralisées sur les femmes… Ce sont des visions, des bouts de vie, qui passent, qui font grandir Boncza, qui lui-même, ayant été à l’école hongroise et ayant un peu plus de jugement que les autres sans pour autant être moins appréciable à certains moments, pose aussi un regard critique, distant, sur sa communauté. Sur le monde extérieur dans lequel il tente de s’intégrer, aussi.
Ce qui traverse aussi le livre, c’est tous ces sentiments qu’il livre au cours de sa narration. La colère, le rejet, la déception, le désir, la sensation d’être toujours étranger dans un monde étrange, entre deux univers, celui de la société hongroise, celui de la société tzigane. Un constant écartèlement qui le rend distant même par rapport à sa famille, qui forme aussi toutes les contradictions de son caractère. Pris entre deux mondes, on ne s’attache pas vraiment à lui, sans pour autant réussir à se détacher de son récit, dense et qui montre des réalités multiples, des sujets qui hantent sa vie : misère, discrimination, vision (plutôt mauvaise) des femmes…Comme beaucoup de ses semblables à la fin du roman, il est déchiré entre passé et présent, entre deux sociétés, nostalgique d’un temps révolu, d’un âge d’or des tziganes, et cependant sans illusion sur le moment présent. Ce qui rend la fin d’autant plus sombre et triste, où là, seul le lecteur peut recoller les morceaux pour comprendre ce qui se passe…
Roman à tendance autobiographique hongrois.
Titre original :Füstos Képek Editions : Actes Sud, collection Babel
Parution française : 2000 (originale, 1975)
Disponibilité : en librairie (8,70 euros)
372 pages.
EAN :9782742728985
Lecture en cours : Frankenstein, Mary Shelley.
http://lamalleauxlivres.com/couleur-de-fumee-une-epopee-tzigane-menyhert-lakatos/http://lamalleauxlivres.com/wp-content/uploads/DSCN1356.jpghttp://lamalleauxlivres.com/wp-content/uploads/DSCN1356-150x150.jpgHauntyaNon classéCouleur de fumée,Füstos Képek,Menyhért Katalos,Roman hongrois,tziganePourquoi ce livre ? Il s'agit du livre de septembre pour les lectures communes avec la blogueuse de Passage à l'est. Une manière de découvrir ainsi la littérature hongroise...
Un enfant grandit, écartelé, entre sa communauté tzigane de naissance et la société hongroise dans laquelle il est scolarisé. Au...HauntyaHauntyabunesque@live.frSubscriberDiplômée en métiers du livre et en digital humanities, elle adore la littérature depuis son enfance. Spécialiste des livres de bibliothèques rendus en retard, ses lectures sont variées même si elle affectionne particulièrement les classiques et les romans du XIXe siècle, avec un chocolat chaud ou un thé. Elle ne demande qu'à ce que les livres la fassent rêver mais aussi réfléchir. Blog personnel : http://hauntya.wordpress.comLA MALLE AUX LIVRES
Diplômée en métiers du livre et en digital humanities, elle adore la littérature depuis son enfance. Spécialiste des livres de bibliothèques rendus en retard, ses lectures sont variées même si elle affectionne particulièrement les classiques et les romans du XIXe siècle, avec un chocolat chaud ou un thé. Elle ne demande qu'à ce que les livres la fassent rêver mais aussi réfléchir. Blog personnel : http://hauntya.wordpress.com Hauntya a écrit 40 articles sur Lamalleauxlivres.com.
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