Quand le requin dort – Milena Agus
On m’avait souvent parlé en bien de cette auteure italienne, et puisque ce livre était en coup de cœur à ma bibliothèque et était surtout assez court –une centaine de pages-, je me suis laissé tenter. Par contre, si je ne fus pas déçue par l’agréable et poétique écriture de l’auteure, le ton du bouquin fut cependant tout à fait différent de ce à quoi je m’attendais…
Sardes depuis le Paléolithique supérieur, les Sevilla-Mendoza ignorent la normalité. Un père entiché de voyages lointains, une mère perdue devant la vie, une tante plongée dans des amours sans lendemain, un frère sourd à tout sauf à son piano. Celle qui décrit l’étrange et attachante ambiance familiale, avec une impassible candeur, est une adolescente engluée dans une liaison inavouable… Une liaison qu’elle cache à sa famille, où pourtant on parle d’amour et de sexe sans inhibitions. On y parle aussi de Dieu, dont on n’arrive pas à décider s’il existe ou pas. Plutôt qu’à lui, autant s’en remettre à la superstition pour affronter les dangers de l’existence. Celle-ci se déroule comme si on était dans la gueule d’un requin. Un requin qui vous enserre entre ses dents et vous empêche de vivre. On essaye d’en sortir quand il dort… Dans ce livre, le plus poignant de Milena Agus, on retrouve sa voix inimitable, capable de toutes les audaces.
Je pensais avoir affaire ici à un roman plutôt léger voire même drôle, sentiment conforté par le fait que la narratrice est ici une adolescente et par le début du livre nous décrivant la vie d’une famille pas très ordinaire. Et pourtant, au fur et à mesure que j’avançais dans l’histoire, force fut de constater que j’avais bien tort, et que le destin de cette famille sarde est bien plus tragique que ce que j’avais imaginé au départ. Mais si je fus surprise par cette tournure inattendue, cela ne change finalement pas le plaisir que j’ai eu à lire cette histoire.
Si la vie de cette famille est loin d’être amusante, elle n’en demeure pas moins touchante d’humanité, et ce d’autant plus qu’elle nous est racontée à travers les yeux d’une adolescente qui essaie de trouver sa place dans le monde et de survivre face aux difficultés de la vie. Il s’agit ici de trouver le moment où « le requin dort » afin de pouvoir espérer échapper à sa mâchoire piétinant sans pitié les existences de chacun, et ce au moment où l’on s’y attend le moins. Malgré les épreuves de la vie, la narratrice parvient à continuer, malgré les difficultés, apprenant que rien n’est jamais facile et que la vie est faite avant tout de souffrances et de combats.
Le reste de la famille est également touchant, chacun à leur manière. Entre le père toujours absent qui cherche à faire le bonheur des gens démunis au bout du monde, mais pas chez lui, à la tante qui enchaîne les relations et essaie encore et toujours de croire à l’amour ; la galerie des personnages présentée dans ce livre est à la fois variée, mais toujours avec ce point commun du combat de tous les jours pour vivre.
L’écriture de Milena Agus est poignante, mais paradoxalement, elle est également légère, donnant au tout un ton original et poétique décrivant à merveille les malheurs de cette famille, mais aussi le peu de bonheur qu’ils parviennent malgré tout à trouver.
Bref, si vous cherchez un roman court, mais fort en émotion, avec des personnages et une écriture originale, je ne peux que vous recommander de lire celui-ci !
Editions : Liana Levi
Date de sortie : 4 mars 2010
Prix : 15,20 €
Nombres de pages : 160 pages
ISBN : 978-2-86746-538-3
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Je vais peut-être tenter… j’ai lu Mal de pierre du même auteur, et malgré les critiques excellentes lues ici et là je n’avais pas accroché… mais il paraît qu’il ne faut jamais rester sur une mauvaise impression.