Les gens heureux lisent et boivent du café – Agnès Martin-Lugand
Pourquoi ce livre ? C’est vrai que l’un des attraits premiers d’un ouvrage, c’est sa couverture, et son titre. C’est ce qui m’a attirée pour ce roman, dont le synopsis ne me tentait pourtant pas plus que ça. L’image n’est d’ailleurs pas sans évoquer le roman Rien ne s’oppose à la nuit de Delphine Vigan. Elle m’a en tout cas attirée et je dois avouer que je ne me suis fiée qu’à ce premier aperçu pour emprunter ce livre, après l’avoir aperçu en librairie. Et puis, il faut bien parfois des lectures de hasard, on ne sait jamais trop sur quoi on peut tomber, mauvais livre ou petite perle…
Diane a brusquement perdu son mari et sa fille dans un accident de voiture. Dès lors, tout se fige en elle, à l’exception de son coeur, qui continue de battre. Obstinément. Douloureusement. Inutilement. Egarée dans les limbes du souvenir, elle ne retrouve plus le chemin de l’existence. Afin d’échapper à son entourage qui l’enjoint à reprendre pied, elle décide de s’exiler en Irlande, seule. Mais, à fuir avec acharnement la vie, elle finit par vous rattraper…
Le synopsis exprime très bien le coeur du roman. Nous suivons, à la première personne, le récit de Diane et de son deuil, de son retour à la vie, durant deux cent pages. La trentenaire, effondrée, abattue et vivant littéralement recluse, choisit d’échapper à la menace de son collègue Félix (il souhaite l’entraîner dans des fêtes et faire des rencontres, en espérant lui redonner un peu d’envie de vivre) en partant vivre en Irlande pendant plusieurs mois. Pourquoi l’Irlande, parce que son mari, Colin, aurait voulu y aller. Elle choisit donc une ville au hasard, minuscule, et s’y exile. Là-bas, au début, son existence ne change pas : elle continue à porter les vêtements de son mari, à vivre dans ses souvenirs, éclusant cigarette sur cigarette au milieu de sa tristesse. Puis c’est la ville en elle-même, ses habitants empreints de gentillesse, tout comme les propriétaires du cottage que loue Diane, qui l’aident à refaire un peu surface. Et surtout, l’arrivée de son voisin, le neveu quasi fils de ses propriétaires, un certain Edward, et sa soeur Judith, pleine de vie.
Alors pour ma part, j’ai beaucoup apprécié la première partie qui raconte ce qui est arrivé à Diane, comment elle réagit, choisir de partir pour l’Irlande, les débuts de sa vie là-bas. Ca commençait plutôt agréablement, l’écriture n’était pas exceptionnelle – composée en majeure partie de dialogues – mais cela s’avérait sympathique à lire. Et puis, à partir de l’arrivée d’Edward en voisin acariâtre et solitaire, les clichés se sont engouffrés dans le roman à vitesse grand V – même si déjà certaines réactions de l’héroïne me paraissaient un peu bizarres par moments. Par exemple, en se rendant devant la tombe de son mari et sa fille pour la première fois depuis un an où elle n’a été que renfermée et déprimée, elle se met soudain à leur parler presque avec enthousiasme…bon, passe encore.
Mais quand Edward est entré dans l’intrigue, on commençait à deviner l’intrigue des kilomètres à la ronde : malgré leurs caractères en conflits (ce qui est déjà en soi un cliché trop repris pour devenir réellement drôle ou surprenant dans beaucoup d’oeuvres) ça allait forcément virer à de la romance pour eux et ce serait forcément lui qui l’aiderait à se reprendre en main. Que ça ait duré aussi longtemps à se mettre en place était déjà un petit record, mais les réactions de Diane paraissaient parfois trop « rapides » en comparaison de la première partie où elle est bien déterminée à ne pas vivre et presque à rejoindre sa famille. Cela faisait un contraste trop rapide ou peut-être trop évident, trop exposé aux yeux du lecteur, au lieu de le faire en subtilité. Ca m’a quand même fait sourire qu’à un moment, du coup, Diane se reproche à elle-même, par culpabilité, d’être aussi rapide à s’attacher à un homme connu depuis quelques semaines d’abord comme ennemi puis soutien alors que son mari est décédé.
La seconde partie, si on peut dire, se concentre sur le retour d’une ancienne petite amie d’Edward, qui correspond assez clairement au stéréotype de femme fatale/veuve noire manipulatrice et égoïste pour qu’on le trouve aussi assez cliché, ce qui forme un triangle amoureux comme on en voit pas mal. Je laisse à partir de là l’histoire en suspense, si vous voulez lire, mais la fin se détourne fort heureusement légèrement des clichés auxquels on pourrait s’attendre.
Le roman est certes court – même si honnêtement le nombre de pages ne veut parfois rien dire du tout – et c’est sans doute pour cela que l’histoire évolue rapidement. L’histoire en elle-même, le style assez simple, sont très agréables à lire et d’ailleurs il ne faut pas beaucoup de temps pour finir le livre. Les personnages ne sont pas trop irritants non plus même s’ils trimbalent pas mal de clichés (il va falloir un temps avant qu’Edward redevienne totalement assimilé à Edward Rochester et non Edward Cullen :p ), ce qui m’aura un peu agacée et un peu gâché le plaisir de lecture. Cela n’en demeure pas moins un joli roman, sans rien d’exceptionnel, une lecture agréable pour quand on en a envie et qui convient peut-être bien, justement, aux lectures d’été car il se dégage malgré tout pas mal de positif de ce roman. Les faiblesses qu’on y discerne viennent peut-être du fait que ce livre était d’abord auto-édité sur Amazon et que Michel Lafon, repérant les critiques (et ventes) positives a choisi de le racheter et de le redistribuer. J’ignore s’il y a beaucoup de différences entre les deux états du texte – ce serait intéressant de le découvrir !
« Et depuis un an, je me répétais tous les jours que j’aurais préféré mourir avec eux. Mais mon cœur battait obstinément. Et me maintenait en vie. Pour mon plus grand malheur. »
Quant au titre, il vient du nom du café littéraire que tenait Diane avant le décès de sa famille…
Roman français.
Editions : Michel Lafon – Pocket
Parution originale : 2013
Disponibilité : en librairie (7 euros chez Pocket)
186 pages.
EAN : 9782266243537
Lecture en cours : L’aliéniste de Caleb Carr & Mémoires de Pierre-François Lacenaire
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