Le Problème Spinoza – Irvin Yalom
Me revoilà pour vous parler à nouveau du même sujet que la dernière fois, mais d’une manière tout à fait différente. En effet, après vous avoir présenté un livre présentant la philosophie de Spinoza, voici un roman exposant sa vie, particulièrement au moment où le philosophe fut excommunié par sa communauté religieuse. Si vous n’aimez pas la philosophie, ce livre est donc tout à fait pour vous ! Car non content d’exposer le parcours de vie de Spinoza et de le mettre en relation avec sa propre philosophie, l’auteur nous met également en parallèle une autre histoire. Celle d’un nazi qui, trois siècles plus tard, sera fasciné par Spinoza. Car avant d’être excommunié à l’âge de vingt-quatre ans, Baruch Spinoza était effectivement un membre respecté de la communauté juive d’Amsterdam. Un parallèle original et intéressant, que je vous laisse découvrir plus en détail avec le résumé.
Amsterdam, février 1941. Le Reichleiter Rosenberg, chargé de la confiscation des biens culturels des juifs dans les territoires occupés, fait main basse sur la bibliothèque de Baruch Spinoza. Qui était-il donc ce philosophe, excommunié en 1656 par la communauté juive d’Amsterdam et banni de sa propre famille, pour, trois siècles après sa mort, exercer une telle fascination sur l’idéologue du parti nazi ? Irvin Yalom, l’auteur de Et Nietzsche a pleuré, explore la vie intérieure de Spinoza, inventeur d’une éthique de la joie, qui influença des générations de penseurs. Il cherche aussi à comprendre Alfred Rosenberg qui joua un rôle décisif dans l’extermination des juifs d’Europe.
Comment ce livre est arrivé entre mes mains ?
J’avais repéré ce livre depuis un petit moment. Mais ce n’est qu’une fois avoir acquis 100 mots sur l’Ethique de Spinoza que je me suis décidée à l’acheter. Mon choix de revoir d’abord la philosophie de Spinoza avant d’aborder ce roman est tout à fait personnel, et pas du tout obligatoire. Au contraire, si vous ne connaissez pas du tout cette philosophie, le roman permet de l’introduire avec simplicité et clarté. Le pouvoir de la fiction, on pourrait dire. Et même en dehors de tout intérêt philosophique, ce roman est intéressant pour ses aspects historiques et biographiques, nous permettant d’appréhender deux figures ayant marqué l’histoire : Spinoza, philosophe aux origines juives et qui a choisi de vivre en dehors de toute religion et influence, et Alfred Rosenberg, considéré comme l’idéologue du parti nazi.
Et alors, qu’est-ce que ça donne ?
L’histoire de Spinoza m’intriguait fortement, et cette version romancée qui prend certaines libertés avec l’histoire me semblait toutefois intéressante à aborder.
Même si je dois avouer avoir eu quelques hésitations, en voyant que l’auteur était un psychanalyste et qu’apparemment, il faisait en quelques sortes une analyse de ces deux personnages clés dans son roman. Je ne suis que moyennement convaincue par la psychanalyse, sur certains points du moins que je trouve exagérés, et dois admettre ne pas y connaître grand-chose. Mais je me suis dit : pourquoi pas ? D’autant plus que l’auteur ne cachait pas du tout son approche, et explique bien sa démarche à la fin du livre.
Le résultat fut pourtant positif, et mes a priori rapidement effacés. En effet, que l’on soit connaisseur ou non de la méthode de Freud, les dialogues m’ont semblés cohérents et pertinents. De même que le lien entre Spinoza et Rosenberg. Rien ne prouve historiquement ce qui est dit dans le roman, à savoir qu’Alfred Rosenberg a cherché à comprendre comment un juif pouvait avoir écrit des paroles si justes et si proches de ses propres idées. Même si l’auteur a inventé tout cela en tentant de se mettre à la place de ces deux personnages, on doit lui reconnaître que le tout tient la route.
Par contre, un tout autre point qui m’a frappé dans ce livre : sa violence. Pas physique, mais psychologique. Premièrement avec Spinoza. Cet homme érudit et pacifique a été rejeté avec violence par sa communauté. Ainsi à vingt-quatre ans, il a été excommunié par une sentence d’une rare violence et à partir de cet instant, aucun juif ne pouvait ni l’approcher, communiquer avec lui ou même lire ses écrits. Même sa famille a dû le rejeter. Pour Rosenberg, ce fut bien évidemment ses idées antisémites qu’il défend avec force qui furent parfois dures à lire. Il a après tout écrit un livre qui guidera l’idéologie nazie et mènera aux massacres que l’on connaît malheureusement.
Pourtant, cette violence est combattue en la figure de Spinoza. Malgré son exclusion, il choisit de vivre une vie simple, refusant tout aide financière et polissant le verre pour être automne financièrement. Il prône une philosophie de la joie et de l’amour, s’efforçant de vivre selon ses principes pour connaître le bonheur. C’est un personnage si marquant qu’il influencera bons nombres de personnalités importantes et est toujours respecté par les plus grands penseurs. En cela, l’influence supposée par l’auteur de ce roman qu’il ait pu marquer un nazi montre un autre aspect de l’espoir et du courage qu’inspire Spinoza. Alfred Rosenberg ne saura jamais vraiment quoi penser de lui, respectant ses idées tout en ne pouvant pas tout à fait les comprendre. Et encore moins comprendre le fait qu’il ait pu venir d’un milieu juif. C’est ainsi qu’il tentera de résoudre ce qu’il nommera « Le problème Spinoza » en analysant l’œuvre du philosophe pour y trouver des réponses, sans jamais y parvenir.
Pour conclure, je dirais qu’il faut prendre ce livre comme ce qu’il est : un roman fictif, s’inspirant de faits réels, et ne pas prendre tout ce qui s’y trouve comme vrai. L’auteur a utilisé quelques réalités historiques pour construire une histoire très intéressante selon son point de vue et celui de la psychanalyse. J’ai en tous cas passé un excellent moment en le lisant, et pour le coup, vous le conseille fortement comme lecture estivale. C’est pour ma part un coup de cœur. Il vous fait découvrir un philosophe vraiment passionnant, et qui continue à inspirer bons nombres de gens avec sa philosophie.
Pour quel(s) lecteur(s) ?
Ceux intéressés par Spinoza, ou par son histoire. Ceux qui aimerait commencer par lire son œuvre et voudrait un moyen simple de se plonger dans sa philosophie. Ceux qui veulent simplement un bon roman pour découvrir deux personnalités importantes de notre histoire.
La citation :
« Pourquoi un même livre suscite-il des réactions aussi diverses ? Il doit y avoir en chaque lecteur quelque chose qui fait qu’il adhère à un livre. Dans sa vie, dans sa psychologie, dans l’image qu’il a de lui-même. »
Pour se le procurer :
Éditions : Livre de Poche
Date de sortie : 29/01/2014
Prix : 8.1 €
Nombre de pages : 548 pages
ISBN : 9782253168683
Lectures en cours:
Testament à l’anglaise de Jonathan Coe
The Luminaries d’Eleanor Catton
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