Les renards pâles – Yannick Haenel
Pourquoi ce livre ? Le quatrième sur la liste…
Un homme choisit de vivre dans sa voiture. A travers d’étranges inscriptions qui apparaissent sur les murs de Paris, il pressent l’annonce d’une révolution. Le Renard pâle est le dieu anarchiste des Dogon du Mali ; un groupe de sans-papiers masqués porte son nom et défie la France. Qui est ce solitaire en attente d’un bouleversement politique ? Qui sont les Renards pâles ? Leur rencontre est l’objet de ce livre ; elle a lieu aujourd’hui.
Le quatrième livre de la sélection du Prix du roman étudiant est un autre de ces titres dont je ressors assez mitigée. L’histoire, vacillant entre l’absurde et la révolte sociale, présente le parcours d’un homme au chômage qui, faute de moyens, de volonté consciente de retrouver sa place dans la société, choisit de vivre dans sa voiture. Au gré de ses errances, il effectue plusieurs rencontres, dont celle des Renards pâles, d’abord par le biais de graffitis, de dessins, de symboles, puis par les membres de cette révolution nihiliste contre la société même. C’est donc, en une première partie composée de chapitres courts, la description de la réflexion d’un homme qui a décidé de vivre en marge sans plus rien devoir à la société, puis en une deuxième longue partie sans chapitres, la révolution elle-même menée par ce groupe, non violent, mais qui défend les étrangers et les sans-papiers, qui ne se présente qu’avec des masques d’animaux sur la tête, pour répondre à un ancien culte anarchiste.
« À l’époque, j’accordais peu d’importance à ce qu’on nomme les relations humaines ; peut-être n’avais-je pas besoin de faire croire aux autres que j’étais vivant. »
La première partie m’a plu, par les réflexions assez acerbes et réalistes sur la société que fait le narrateur. Il manifeste une sorte de philosophie rebelle contre elle, montrant ses mauvais côtés – et surtout les côtés répressifs, il faut bien le dire – au niveau du travail, de la considération des étrangers, des chômeurs, de la culture, de la politique. Sans que ce soit trop mirobolant ni ne propose quelque chose de totalement nouveau par ailleurs, on peut s’y retrouver, approuver ou désapprouver. Il cherche surtout à montrer que la société oppresse et détruit, plus qu’autre chose ; à montrer comme le social a un effet pervers et combien il devient difficile de ne pas se plier au monde et de lui obéir, en étant obligé de travailler, de donner son identité, son adresse de domicile…Cette première partie est assez intéressante, il faut le dire, assez bien écrite, et propose un cheminement intéressant.
Là où ça se gâte, c’est avec la deuxième partie ; on change déjà de rythme de narration (plus de chapitres courts successifs mais une seule longue partie) mais c’est le contenu qui perd le plus. Le narrateur part dans sa révolution, dans celle des Renards pâles, décrit leur philosophie, leur manière de manifester, d’aider les sans-papiers, le tout abreuvé de philosophie assez nihiliste et peu emplie d’espoir au final. Et tout le délire autour du dieu anarchiste, des masques d’animaux, m’a complètement perdue. Là où la première partie était absorbante et nous faisait comprendre parfaitement l’état d’esprit du narrateur, il passe à une sorte de conscience collective confuse, délirante. Et je dois dire que si l’auteur part dans son délire, on n’arrive pas à le suivre. J’ai fini les derniers pages sans réellement les lire à fond même si j’étais attentive, je m’en désintéressais de plus en plus alors que le livre m’avait intriguée au début. Je n’en ai pas retenu grand-chose, au final. Le lecteur se perd, à mon avis, égaré par les motivations sociales et politiques de l’auteur. Encore une fois, on ne peut pas aimer chaque livre…
« On veut nous faire croire que le travail est la seule façon d’exister, alors qu’il ruine les existences qui s’y soumettent. Ceux qui s’imaginaient survivre grâce à un travail cherchent désormais comment survivre à celui-ci. Et si chacun parvenait à en finir avec sa propre docilité – à briser dans sa vie la sale habitude d’obéir ? Une grève générale éclaterait enfin, qui plongerait le pays dans le tumulte. Avec un plaisir ambigu, j’imaginais la France étouffée dans son chaos. »
Plus je progresse, plus je me rends compte que je retrouve ce qui ne me manquait pas du tout dans le style français contemporain et l’assimile à du nombrilisme pour moi : cette habitude exaspérante de faire un narrateur sans cadre, sans repères, sans caractérisation, sans doute afin de se rapprocher du lecteur, mais qui reste trop vague pour moi. Soit on assimile le narrateur à un personnage, soit on dit clairement que c’est l’auteur qui parle à travers le narrateur (bien que ce soit classé en « roman »), mais bon, on a passé le temps des enfantillages, on n’est pas dupes…
Roman français.
Editions : Gallimard
Parution originale : 2013
Disponibilité : en librairie (16 euros)
174 pages.
EAN : 9782070142170
Lectures en cours : Le voyage de G. Mastorna de Federico Fellini
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